Dans un communiqué interne diffusé vendredi 24 mars, la direction annonce « la dématérialisation des demandes de collaborations extérieures ».
En clair : les salariés souhaitant travailler, intervenir ou enseigner à l’extérieur de France Télévisions (entreprises, organisations, établissements scolaires…) devront désormais effectuer leur demande d’autorisation sur une plateforme dédiée, via l’intranet.
Moderniser la procédure ? Pourquoi pas ! Mais pour le SNJ, c’est surtout d’équité et de transparence dont nous avons besoin. En matière de collaborations extérieures, France Télévisions manque souvent de rigueur.
Les collaborations extérieures des salariés de France Télévisions ont été encadrées en 2011 (accord journalistes) puis en 2013, dans l’accord collectif signé par l’ensemble des syndicats représentatifs au niveau de l’entreprise.
Dix ans après, quel bilan tirer de ce dispositif ?
Concernant les journalistes, le texte prévoit de réunir deux fois par an une commission de suivi « déontologie et principes professionnels ». La direction doit y présenter aux représentants syndicaux un état des lieux des collaborations extérieures du dernier semestre.
Si la commission de suivi « déontologie » existe bel et bien, et traite des dizaines de situations chaque année, l’examen des collaborations extérieures est souvent partiel.
Par manque de temps, certes, mais surtout par manque d’informations complètes : régulièrement, des « ménages » notoires disparaissent des listes communiquées aux syndicats, laissant planer le doute sur la sincérité des déclarations de la direction.
Nous ne sommes pas dupes, les « petits arrangements » n’ont pas disparu depuis l’accord d’entreprise de 2013. Trop de directions locales s’accommodent encore d’entorses à nos règles déontologiques. Des collaborations extérieures théoriquement interdites par l’accord collectif sont parfois autorisées, le plus souvent tolérées. Une complaisance qui entache le devoir d’exemplarité du service public, et jette parfois le discrédit sur des rédactions entières.
Pourtant, nos textes sont clairs : « le journaliste doit s’assurer que la collaboration envisagée ou l’existence d’intérêts croisés, ne mettent pas en cause son indépendance et sa crédibilité » (page 173 de l’accord collectif).
Concernant le « mediatraining » d’hommes politiques ou de patrons d’entreprises, par exemple, pas de doute : c’est strictement interdit. Et ces règles s’appliquent à chaque journaliste, tant qu’un contrat de travail le lie à France Télévisions. Un congé sabbatique, ou un congé sans solde de circonstance, n’exonère pas la direction de ses responsabilités, et ne permet pas à un journaliste de piétiner l’éthique professionnelle.
Nous verrons à l’usage si cette nouvelle plateforme s’avère un outil efficace pour faire appliquer nos textes conventionnels et les règles déontologiques en vigueur à France Télévisions. A minima, les bilans semestriels devraient être plus complets et plus précis…
Un bon début, mais ça ne suffira pas !
Par ailleurs, sans mettre en doute le sérieux de la direction de la conformité, de l’éthique et de la déontologie (en charge de cette plateforme), il est indispensable que des journalistes de la direction de l’information exercent un contrôle des collaborations extérieures de leurs pairs.
Au-delà de cette dématérialisation, l’urgence est bien l’harmonisation des pratiques dans les rédactions.
En matière de déontologie et d’éthique professionnelle, elles doivent respecter la rigueur, la transparence et l’équité.
La direction doit mettre fin à l’opacité et aux « petits arrangements » qui ne servent que les intérêts de quelques-uns et peuvent parfois décrédibiliser le travail de tous.
Paris, le 30 mars 2023