
Le projet MedIAGen, développé par France Télévisions, introduit des technologies basées sur l’intelligence artificielle. Depuis près d’un an, les élus du CSE Central demandent à l’entreprise de respecter son obligation légale de consulter l’instance avant toute introduction de nouvelles technologies.
Les préconisations européennes et les jurisprudences sont claires : elles rendent obligatoire le cadrage global, avec les représentants du personnel, des modalités d’exploitation des IA, susceptibles d’affecter le travail et l’emploi des salariés.
Jusqu’à présent, la direction, comme à sa fâcheuse habitude, est restée sourde à nos avertissements.
Pour elle, imaginez le culot, l’intelligence artificielle générative n’est pas une nouvelle technologie. Concédons-lui tout de même une chose : elle a, de guerre lasse, fini par inscrire deux demi-journées d’échanges en novembre dans un calendrier social déjà très chargé. Pas très sérieux tout de même quand on a l’ambition affichée de vouloir négocier un accord cadre sur l’IA à France Télévisions.
Face à l’obstination de la direction, les élus du CSE Central n’ont pas eu d’autre choix que de saisir le juge. Bien leur a pris. Le jugement vient conforter leur position. Le tribunal a rappelé dans son jugement que la loi ne conditionne pas l’obligation de consultation à une modification majeure ou à des impacts spécifiques sur l’emploi : il suffit que la nouvelle technologie puisse potentiellement avoir des conséquences sur la situation des salariés. L’IA est donc pleinement concernée.
Le cas de MedIAGen illustre cette exigence : déjà utilisé par environ 800 salariés depuis 2024, l’outil transforme l’organisation du travail (autonomisation, assistants numériques, formations dédiées) et pourrait avoir des effets significatifs sur l’emploi, l’autonomie et la charge de travail.
Pour le juge « il n’y a aucune exigence d’importance, ni d’impact sur des aspects ciblés de la relation de travail et il suffit que la mise en œuvre des nouvelles technologies soient susceptibles d’avoir un impact sur la situation des travailleurs », « il est manifeste qu’une technologie faisant appel à l’intelligence artificielle est une technologie nouvelle. »
Constatant l’absence de consultation préalable, la justice a enjoint à France Télévisions de suspendre le déploiement de MedIAGen et de convoquer son CSE central pour le consulter. Une astreinte de 1.500 € par jour de retard pendant six mois a également été prononcée pour garantir l’exécution du jugement.
Le juge ne donne pas gain de cause aux élus concernant Raiponse V2. Il estime que le CSE Central a déjà été consulté en 2022 sur la V1 de Raiponse et que les modifications ne sont pas suffisamment significatives pour nécessiter une seconde consultation.
Dont acte, mais il résulte néanmoins de la jurisprudence de Nanterre du 14 février 2025, renforcée par le jugement de Créteil de juillet 2025 et aujourd’hui celui du tribunal de judiciaire de Paris une obligation capitale pour notre avenir à toutes et tous :
La nécessité d’être consulté dorénavant sur tous les projets technologiques qui intègrent une dimension d’intelligence artificielle.
En résumé, les élus et le tribunal convergent : France Télévisions doit impérativement respecter ses obligations d’information-consultation avant tout déploiement de projets intégrant de l’IA, afin d’évaluer leurs impacts sur l’emploi, l’organisation et les conditions de travail. Il en va de la protection des salariés.
Paris, le 4 septembre 2025