C’est une nouvelle menace que le pouvoir politique fait planer sur le service public audiovisuel. Le candidat-président Macron n’hésite pas à faire dans le populisme en annonçant une suppression de la redevance.
Il suit donc les pas de Valérie Pécresse et des candidats de l’extrême-droite, Marine Le Pen et Eric Zemmour, qui ajoutent leurs intentions de privatiser tout ou partie de France télévisions et Radio France.
L’audiovisuel public, déjà fortement affaibli par la baisse des ressources liées à l’arrêt de la publicité en soirée, premier coup de boutoir asséné par Nicolas Sarkozy, serait ainsi une victime collatérale de la campagne électorale de 2022.
A l’heure où les équipes de reportage de France télévisions font honneur à la profession et au service public avec une couverture exigeante et complète de la guerre en Ukraine, cette surenchère est d’autant plus nauséabonde.
A cause des trains d’économies en série, France Ô a été rayée de la carte, France 4 a été sauvée in extremis, après une prise de conscience très tardive de l’utilité de ses programmes éducatifs en période de pandémie. Le réseau régional de France 3 se voit sommé de réaliser un début de fusion qui ne dit pas son nom avec France Bleu, via la plateforme numérique commune.
La rupture conventionnelle collective, validée par des syndicats pompiers pyromanes, mais pas par le SNJ, a eu pour conséquence la suppression de centaines de postes dans tous les établissements de France télévisions.
Au final, ça craque de partout. Surcharge de travail dans les rédactions et les services, amplitudes horaires qui augmentent dangereusement, tout comme le stress, et la perte de sens au travail. Quant au pouvoir d’achat des salariés, il ne cesse de baisser, tout particulièrement dans le contexte de la reprise de l’inflation.
Jusqu’où ira cette pernicieuse fuite en avant ? Pourquoi cet acharnement des autorités de tutelle, gouvernement et Parlement, dans la casse du service public et de ses milliers de salariés ?
La contribution à l’audiovisuel public, la « redevance », représente 138 euros par an par foyer fiscal, somme adossée à la taxe d’habitation. Elle est déjà une des plus faibles d’Europe. Avec 2,4 milliards d’euros par an pour France télévisions, elle représente plus de 80 % du budget de l’entreprise.
Cette suppression promise de la redevance, faussement improvisée par le candidat-président, est en fait une étape supplémentaire pour celui qui considérait le service public comme « la honte de la République ».
Aucun financement digne de ce nom n’est annoncé par les différents relais et porte- paroles de M. Macron pour pallier l’abandon de la redevance. Une ligne de plus sur le budget de l’Etat permettrait, nous dit-on, d’abonder les caisses du service public. Mais sans aucune garantie, si ce n’est celle d’un chantage au financement de la part de la majorité en place, chaque année, lors du vote du budget au Parlement.
La promesse de supprimer la redevance audiovisuelle est un effet d’annonce électoraliste éminemment destructeur, dangereux pour l’indépendance du service public, et de plus hypocrite vis-à-vis des électeurs. Car si les moyens alloués sont maintenus sous une autre forme, ce sera toujours l’argent des contribuables, sans aucune augmentation de leur pouvoir d’achat.
Paris, le 8 mars 2022