Nom de code : Tanuki

Un projet peut en cacher un autre. Après Tempo, puis la fusion programmée avec Radio France, le SNJ a découvert voilà quelques semaines que la direction travaillait dans l’ombre depuis plus de six mois sur une mystérieuse transformation. Son nom de code ? Tanuki. Dans la mythologie japonaise, le tanuki est un esprit de la forêt, symbole de chance et de prospérité. Hélas, ce petit animal promet cette fois un destin bien plus sombre : la possible disparition du site d’information franceinfo.fr et de son application mobile, et une dégradation sans précédent de l’information de service public.

La direction souhaite en effet que des contenus (articles, vidéos, infographies), aujourd’hui produits par les rédactions de France Télévisions et publiés sur le site franceinfo.fr, soient, dès l’été 2023, diffusés en doublon sur la plateforme de streaming de l’entreprise, france.tv. À partir de 2024, il est prévu que certains contenus relevant de l’information ne soient plus publiés QUE sur france.tv. En 2025, il est envisagé que l’ensemble de la production de l’information bascule sur la plateforme de streaming, signant la disparition de franceinfo.fr. France.tv serait alors l’unique lieu sur lequel le citoyen-téléspectateur pourrait retrouver le dernier numéro de « Complément d’enquête », son JT préféré, mais aussi les articles des rédactions numériques de France Télévisions. Le tout, entre un épisode de Capitaine Marleau, une émission de télé-achat et la finale de Roland Garros. Pire, ce projet envisage des ponts entre contenus d’information et de divertissement, laissant craindre l’assujettissement des premiers envers les seconds. A notre connaissance, aucun grand groupe média au monde n’a mis en place un projet aussi poussé de fusion entre son activité de divertissement et d’information. Y compris ceux, comme la RTBF ou la BBC, ayant rapproché leurs deux offres.

Vous ne saviez rien de tout cela ? C’est normal. Bien qu’il s’agisse là d’une orientation stratégique majeure pour l’entreprise, la direction n’a pas encore pensé à la présenter aux salariés ou aux élus. Une démarche regrettable, puisque cela aurait permis à ces derniers de faire connaître leurs très nombreuses inquiétudes. En premier lieu, pourquoi démanteler un site d’information qui a fait ses preuves ? Franceinfo.fr compte désormais parmi les leaders des sites d’actualité, comme s’en félicitent régulièrement notre présidente et nos directeurs de l’info successifs. Le projet d’une plateforme unique entre information et divertissement relève par ailleurs d’une méconnaissance des usages : on ne consomme pas de la même façon un programme audiovisuel long (majoritairement le soir dans son canapé) et un article d’information (sur son téléphone, dans les transports ou entre deux réunions). En revanche, une telle plateforme fourre-tout participe au mélange des genres entre information et divertissement, à l’heure où France Télévisions s’est donnée comme mission d’aider le citoyen à y voir plus clair dans un océan de fake news. Ce projet pose aussi la question de l’indépendance éditoriale des journalistes de France Télévisions : faudra-t-il bientôt vanter les raisons de regarder le dernier épisode de la série france.tv du moment ? Ou en proposer un résumé, comme pour un match de foot ? Tanuki remet également en cause l’intégrité du média global (franceinfo.fr, franceinfo TV et franceinfo radio) puisque les contenus de Radio France ne pourraient plus être publiés sur cette plateforme. Et ce alors que, dans le même temps, les deux entités prônent leur futur rapprochement auprès de leur tutelle… Enfin, qui sera aux commandes de france.tv, qui n’est aujourd’hui pas tenu par des journalistes ? 

Le pire, peut-être, est que ces renoncements éditoriaux ne garantiront pas le succès d’audience de cette plateforme. Forte de ses douze années d’existence, franceinfo.fr jouit d’un excellent référencement sur les moteurs de recherche et d’une bonne réputation auprès des internautes et du reste de la profession. Sa disparition ne garantit pas, par un mouvement mécanique, le transfert de son audience vers une plateforme de streaming aux usages différents. Pour réclamer des comptes à la direction, le SNJ a demandé, et obtenu, que le projet Tanuki soit inscrit à l’ordre du jour du CSE, qui aura lieu fin mars. Sans attendre, il appelle les salariés à faire connaître leur opposition à ce projet délétère. Ensemble, luttons pour préserver l’information de service public !

Paris, le 13 mars 2023

Préavis de grève franceinfo: sport le 19 mars 2022 !

La direction de France Télévisions affirme vouloir développer l’offre d’information sportive sur ses plates-formes numériques, tout en refusant d’y affecter des postes permanents. 

Aujourd’hui, plus de 80% des articles publiés par franceinfo: sportsont écrits par des journalistes précaires (en CDD ou en piges), des apprentis ou des stagiaires ! Et du côté du pôle vidéo, ce n’est pas mieux : la direction n’y assume même pas son rôle d’employeur, préférant recourir massivement, et depuis des années, à des contrats de « prestations » avec des entreprises extérieures. 

Cette situation n’a que trop duré. Elle est devenue injustifiable par la direction, mais surtout insupportable pour nos collègues. A la rédaction numérique des Sports, des journalistes confirmés subissent cette précarité depuis parfois cinq ou dix ans. Ces consœurs et confrères se relaient 7 jours sur 7, de 7h à minuit, pour assurer notre mission d’information. Ils contribuent largement à la croissance et au succès de franceinfo: sport… mais la direction leur refuse toute perspective d’évolution. 

Là où des recrutements en CDI s’imposent, la direction préfère compter le nombre de jours travaillés par chaque pigiste ou journaliste en CDD, et le priver de travail quand un « plafond » artificiel et arbitraire est atteint !

Le SNJ a alerté la direction de France Télévisions à de nombreuses reprises. En novembre 2021, lors d’un Comité Social et Economique du Siège, les élus ont obtenu qu’un point de l’ordre du jour soit enfin consacré à la situation de la rédaction numérique des Sports. La direction a reconnu un taux de précarité très élevé, avec plus de 10 ETP (équivalent temps-plein) liés aux piges ou CDD, mais n’a pas voulu s’engager sur des embauches en CDI. 

Faute d’avoir été entendus, le SNJ et les journalistes de la rédaction expriment les revendications suivantes : 

– la fin de cette précarité imposée à la rédaction numérique des Sports, et donc le recrutement au cours de l’année 2022 de dix journalistes en CDI pour franceinfo: sport, dont au moins cinq au premier semestre ; 

– la fin du système actuel de « plafond » de jours travaillés pour les salariés non-permanents ; 

– la fin du système d’externalisation, via des contrats de prestation, d’activités permanentes liées à france.tv sport (community management, motion design, pôle vidéo…) et donc l’embauche par la direction des Sports de France Télévisions des salariés effectuant ce travail ; 

– la prise en compte de la pénibilité liée aux horaires décalés pour les journalistes de franceinfo: sport travaillant régulièrement au-delà de 23h ;  

– le versement, pour les journalistes (y compris les non-permanents) remplissant les critères prévus par l’accord collectif France Télévisions de mai 2013 et son avenant du 24 mars 2016, de la prime dite de « week-ends ». 

Pour faire aboutir ces revendications, le SNJ appelle l’ensemble des journalistes de la rédaction numérique des Sports de France Télévisions à cesser le travail à partir du samedi 19 mars 2022 à 00h01, pour une durée de 24 heures. 

Paris, le mercredi 9 mars 2022