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L’intelligence artificielle générative va changer nos pratiques et nos métiers. Personne n’est à l’abri. Mais nous devons anticiper, ne surtout pas rester dans l’admiration béate. À cet égard, le SNJ est particulièrement inquiet de l’utilisation faite de l’I.A. depuis le 13 janvier, dans la nouvelle émission « C pas si loin » de France 5.

On y découvre quotidiennement un sujet introductif du thème ultramarin du jour, avec des images souvent à 100 % issues de l’I.A. C’est indiqué au téléspectateur. Mais aux yeux du SNJ, cette condition nécessaire n’est pas suffisante !

« Nous avons eu l’idée d’utiliser l’intelligence artificielle… », annonce la présentatrice. Oui, mais pourquoi ? Être dans l’air du temps ? Faire des économies ? Les archives des stations de La 1ʳᵉ regorgent pourtant d’images qui auraient bien illustré ces séquences. Quel signal désastreux envoyé aux équipes de reportage sur place !

L’I.A. utilisée par l’émission “C pas si loin” imagine les Outre-mer en cumulant les clichés méprisants que l’on trouve sur internet et les réseaux sociaux :

  • De l’argent (des dollars !) qui tombe du ciel pour subventionner les agriculteurs ultramarins ;
  • Des gratte-ciel en Guyane pour marquer la différence (délirée) entre Cayenne et des bidonvilles, dans le reste du département ;
  • Des champs de maïs à perte de vue, comme on n’en verra jamais outre-mer ;
  • Une université de type Harvard à Mayotte, qui montre une classe mahoraise très IIIᵉ République, non mixte, et avec le sol jonché de terre.

Ce n’est sans doute pas intentionnel, mais la vision colonialiste n’est pas loin avec cette intelligence très artificielle qui mouline selon des biais plus que contestables.

Le dernier congrès national du SNJ a permis de réaliser que même l’outil professionnel le plus intime des journalistes de l’audiovisuel, leur voix, était désormais susceptible d’être remplacé par l’intelligence artificielle.

Tous les débordements sont aujourd’hui techniquement possibles et il faut donc des garde-fous pour préserver les principes élémentaires du journalisme : vérité et réalité de l’information, conformité à notre déontologie.

Le SNJ réclame officiellement et depuis des mois l’ouverture d’une négociation sur ce sujet, avec les organisations syndicales. Face aux débordements visibles sur nos antennes, les webinaires et les recommandations édictées par la direction de France Télévisions ont démontré leur insuffisance.

La preuve est faite : il y a urgence à un remue-méninges génératif d’intelligence tout court. L’I.A. ne doit pas être une nuisance : elle doit être au service de la qualité de l’information.

Paris, le 20 janvier 2025