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De l’extérieur, un gratte-ciel flambant neuf qui en impose… De l’intérieur, la tour n’atteint que les bas fonds d’un marécage, tantôt alimenté par la déconsidération du personnel, tantôt asséché par le manque criant de moyens.

Cette tour abrite le média le plus imposant de l’île. Toutefois, il faut s’approcher des vitres pour tenir une simple conversation ou naviguer sur son portable. Car déjà le réseau n’est pas à la hauteur. Et pas d’ouverture ; oxygéner le cerveau permettrait aussi de réfléchir ! À Martinique La Première, c’est le règne de la prestidigitation.

Sur place, le respect de la convention collective et autres textes s’évapore. Les permanents deviennent de simples exécutants. Les non-permanents, des machines à fabriquer sans interruption, susceptibles d’être envoyés à la casse, sans aucun préavis. Qui a dit qu’un pigiste devait, lui aussi, boire, manger, se reposer, avoir une famille, et payer ses factures ?

C’est d’ailleurs devenu l’un des piliers essentiels d’un fonctionnement abracadabrantesque.

Le plus grand tour : la convergence.

Attention… magie : elle permet de dissimuler un manque considérable d’effectif. Environ 7 postes perdus récemment en radio, par exemple, et non remplacés. Les journalistes pigistes, sur le terrain pour un reportage télé, sont donc sollicités pour alimenter les tranches d’informations de la radio.

Le support prend d’ailleurs régulièrement des allures de petite radio associative. Cas de plus en plus récurrent, celui du 15 mars dernier, avec un seul bénévole… Pardon, journaliste pigiste de reportage. Il faut donc considérer les deux à trois équipes du week-end, en télé, comme du luxe. D’ailleurs, elles ont le don d’ubiquité du samedi et dimanche : toujours les mêmes.

Ainsi, on demande à un occasionnel réalisant plusieurs reportages pour la télé au cours de la journée et de la soirée d’assurer également des directs en radio pour l’édition du soir. On exige d’un présentateur des matinales qu’il produise un reportage complet sur le terrain, à l’issue de sa vacation ou durant ses jours de repos hebdomadaire. On compte sur la conscience professionnelle des présentateurs et de leur encadrant “par intérim” pour produire et pallier l’absence de sujets.

Quant au 18 H radio, il ne doit surtout pas avoir l’ambition de compter un direct. Sauf s’il souhaite devenir un véritable casse-tête. La chargée de réalisation achève sa journée juste avant, excepté si elle accepte de faire le sacrifice d’une prolongation qui ne sera pas rémunérée. Il serait donc pensable de ne pas intervenir en direct sur d’importantes crises sociales, procès ou tout autre fait majeur ?

Mais peut-être faut-il se satisfaire du simple maintien de cette édition ? Au contraire d’un 13 H télé qui apparaît et disparaît, quand bon lui semble, au gré des week-ends, vacances et jours fériés.

Autre tour de passe-passe, le poste de chargé de réalisation. De plus en plus souvent, les journalistes conçoivent des éditions, sans leurs collègues, en découvrant leur absence du planning le jour J.

Le clou du spectacle est orchestré avec les contrats. Nos collègues animateurs et autres intermittents du spectacle obtiennent leurs contrats, puis, très tardivement, leurs paies. Certains effectuent des matinales après avoir effectué une vacation en fin de journée, la veille ou alors avant de poursuivre plus tard dans la journée.

Si seulement nous pouvions en rire… Se divertir des réactions de façade… Des promesses de circonstances… Malheureusement, beaucoup de salariés sont, au mieux, dépités, au pire, angoissés.

Quelles solutions ? Concéder que votre métier passion devienne alimentaire ? Multiplier les arrêts maladie ? Quitter la station pour la concurrence privée ? Être l’énième départ précipité ? Ester en justice ?

En deux mois, le SNJ Martinique a été en mesure de constituer une liste, vous proposer un programme pertinent et audacieux, être le premier à prendre clairement et courageusement position sur des questions épineuses.

C’est le moment de sortir de cette situation ubuesque. Le SNJ prône la défense de l’intégralité des salariés, la transparence, l’équité et le progrès dans le bon sens.

La Martinique, le 19 mars 2025