Ce devait être un projet novateur, mais cela ressemble de plus en plus à une banale chaîne low cost. Derrière les discours des apôtres de la “nouvelle offre” que trouve-t-on ? Le projet d’une chaîne dédiée à l’information, diffusant toutes les 30 minutes des journaux réalisés sans scriptes, sans monteurs et sans techniciens du son.
Présenté en Comité central d’entreprise le 15 janvier, le projet de chaîne info poursuit son parcours sur deux terrains. Celui des experts mandatés par les instances concernées, celui de la négociation initiée par la direction.
Côté expertise, le CCE et les CHSCT du Siège, de Vaise et de Malakoff, ont mandaté des cabinets d’expertises. Ils doivent effectuer leur mission d’ici fin mars afin d’aider les instances à rendre leurs avis sur ce projet avant la mi-avril.
Côté négociation, la direction a transmis aux organisations syndicales un projet d’organisation du travail qualifiée de spécifique à la future chaîne info. L’organisation est basée sur la multiplication des compétences complémentaires et l’apparition de quelques métiers hybrides.
Si le périmètre exact de cette négociation, comme la nature précise de l’accord envisagé, demeurent flous, une chose est évidente : il s’agit pour la direction de créer un précédent.
La nouvelle division du travail qu’elle cherche à introduire dans l’entreprise a vocation à se propager aux autres chaînes, avec l’effet dévastateur sur l’emploi qu’elle induit. .
Le SNJ a dit et répète qu’il est légitime que le service public développe une chaîne d’information en continu, mais pas à n’importe quel prix. Par exemple, il n’y a aucune raison légitime à ce que cette future chaîne fonctionne sans monteur. C’est pourquoi le SNJ demande à la direction de présenter aux élus et organisations syndicales un projet alternatif. Ce projet doit être conforme au mode d’organisation du travail, aujourd’hui en vigueur partout dans l’entreprise. Nous voulons également savoir quel en serait le coût, jugé “exorbitant” par la direction, qui n’apporte pas la moindre preuve en ce sens.
En vérité, le véritable enjeu n’est pas économique mais bien idéologique. La direction de FTV, comme la plupart des patrons, reprend béatement le credo ultra libéral selon lequel les métiers seraient des archaïsmes et leur défense un combat vain.
“Il faut 4 jours pour apprendre à monter” affirme l’un. “Tous les monteurs peuvent faire du journalisme” ajoute l’autre. Cette émulation dans la démagogie participe du même phénomène : placer les salariés en situation de concurrence dans une course absurde aux primes en tout genre et à la vampirisation sans scrupule de l’emploi du voisin.
Les journalistes ne veulent pas prendre les métiers des techniciens. Ils ont déjà assez à faire avec le leur. La multiplication des tâches et la confusion des registres constituent des menaces pour la crédibilité des équipes rédactionnelles de France Télévisions et la certification de ses productions.
Journalistes rédacteurs et JRI de France Télévisions ne revendiquent pas le monopole de la créativité, seulement celui du journalisme. Observer la composition des sociétés d’auteurs suffit pour comprendre ce que signifie le pluralisme des talents dans le respect des compétences de chacun. Il y a neuf ans, les journalistes de France TV ont choisi de confier la gestion de leurs droits d’auteurs à la SCAM.
Depuis, ils y côtoient de nombreux autres auteurs qui ne sont pas journalistes. Dans le numérique, le son, la photo, l’image fixe, l’écrit ou la vidéo, ces réalisateurs, documentaristes et autres créateurs témoignent au quotidien de leur inventivité. La question est de savoir pourquoi France TV fait si peu appel à eux, et quand cela arrive, pourquoi elle les maintient dans la précarité ?
Paris, le 25 février 2016
Tract Chaîne d’information en continu