Depuis des mois, la direction rogne sur les tournages, dégrade les conditions de travail des équipes de reportage, refuse les remplacements et entend supprimer des dizaines de postes dans les rédactions. Avec un alibi répété ad nauseam : « pour sauver l’entreprise, qui est en grand danger, il faut faire des économies partout ». Partout ? Non, bien sûr. Le PDG lui même a beau affirmer qu’il prend parfois le train en 2e classe, des directeurs généraux clamer qu’ils vont se déplacer en métro, les économies ne sont visiblement pas là pour sauver l’entreprise. Peut-être s’agit-il d’équilibrer les gabegies de certaines directions ?
Dernier exemple en date : une édition spéciale sur la situation en Ukraine est réalisée par la rédaction de France 2. Le présentateur attitré du 20 Heures décide de se déplacer en personne, accompagné d’équipes de reportages mais aussi de nombreux cadres. Selon nos informations et celles rapportées par « Le Canard Enchaîné », les équipes auraient été scindées en deux lors du voyage vers la Crimée le week-end dernier.
Pour les équipes de reportage, la direction a montré le chemin de la classe économique. Sur le même avion, le présentateur « vedette », son assistante, une rédactrice en chef et un directeur étaient eux à l’avant de l’appareil, en classe affaires. Pour trois heures de vol.
Cynisme ? Provocation ? Ce comportement est surtout irresponsable et indigne. Le directeur qui s’est déplacé en classe affaires est en effet bien connu des journalistes de France Télévisions. Directeur en charge des « reportages et des moyens de l’information », il est connu pour ses méthodes brutales, régulièrement dénoncées par les représentants du personnel. Un cadre qui bafoue les textes conventionnels et se vante régulièrement de faire des économies de personnel et de moyens sur les reportages… aujourd’hui, on comprend mieux pourquoi ! Sur quels objectifs est évaluée la part variable de ce directeur ?
Pour justifier les suppressions de postes et la dégradation de nos conditions de travail, la direction ne peut plus s’abriter derrière « le contexte budgétaire contraint » et « la gestion raisonnable des deniers publics ». Les arbitrages budgétaires prouvent le contraire : il s’agit bien de préserver, à tout prix, le train de vie luxueux de certains privilégiés et de leur entourage. À quand la transparence sur les frais de représentation des cadres dirigeants ?
Cet épisode honteux se produit au moment même où syndicats et direction débattent des suppressions de postes envisagées pour 2014 et 2015. Lors de ces négociations, l’examen des effectifs de l’entreprise a montré une nouvelle fois que le taux d’encadrement dans les rédactions est anormalement élevé, et qu’il ne correspond pas aux besoins des éditions.
Plutôt que d’entamer une réflexion sur ce problème récurrent à France Télévisions, la direction préfère adopter la politique de l’autruche… tout en s’attaquant aux CDD, pigistes et intermittents, les salariés les plus vulnérables et souvent les plus sollicités. Le Service Public audiovisuel mérite mieux que ce cynisme et cette gestion méprisante de ses équipes. Le SNJ exige de la Direction de l’Information qu’elle condamne cette décision
irresponsable et cette politique insupportable de « deux poids, deux mesures ».
Paris, le 19 mars 2014