A quelques heures de la fin de la campagne officielle et à 48 heures du vote, vendredi 5 mai, des milliers de documents internes, issus d’un piratage massif de boites mails personnelles et professionnelles de membres du mouvement En Marche ont été diffusés sur le web, par divers canaux anonymes relayés sur les réseaux sociaux, assortis de quelques fausses infos, dans le but évident de perturber le scrutin de dimanche.
Si la plupart des journaux de presse écrite ne sont pas tombés dans le panneau, traitant le sujet sans relayer des documents invérifiables dans un laps de temps aussi court, on ne peut que s’inquiéter du zèle avec lequel ont été appliquées les directives de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale (CNCCEP), émanation du ministère de l’Intérieur, qui « appelait l’ensemble des acteurs présents sur les sites internet et les réseaux sociaux, au premier chef les médias mais également tous les citoyens, à faire preuve de responsabilité » en ne participant pas à la propagation de ces contenus. Une « consigne » interprétée parfois comme une interdiction absolue de simplement mentionner l’existence de ces #MacronLeaks.
Or, si le code électoral proscrit la propagande électorale hors les délais de la campagne officielle, évoquer un fait, ne serait-ce que pour décrypter le mécanisme de cette affaire, et/ou mettre en garde les citoyens contre la propagation de fausses nouvelles, ne pouvait en aucun cas être assimilée à de la « propagande électorale ».
Première organisation de la profession, le Syndicat national des journalistes (SNJ) condamne toute intrusion dans les choix éditoriaux des médias. Ces interdits, consignes et rappels, qui se sont multipliés pendant la couverture de la campagne électorale par l’entremise du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), conforté dans un rôle de censeur, s’avèrent d’autant plus absurdes qu’ils ne concernent ni la presse écrite ni les médias en ligne. Le SNJ a déjà dénoncé à maintes reprises l’élargissement des compétences du CSA, consacré par la loi Bloche comme une machine à générer censure et autocensure. Les règles tatillonnes d’égalité et d’équité, instaurées par ce même CSA, ont été combattues par beaucoup et, appliquées scrupuleusement, ont souvent démontré par l’absurde ce que des décisions administratives peuvent entraîner en ce qui concerne le traitement de l’information.
Si, en ce qui concerne les #MacronLeaks, nombre de radios et télés ont finalement choisi de passer outre les « recommandations », il est évident que des injonctions imbéciles et dangereuses ne peuvent que nuire à l’information fournie aux citoyens, et à la crédibilité de médias qui risquent d’apparaître comme les vecteurs d’une censure d’Etat, sur une information circulant pourtant librement sur Internet. Et ce, sans la garantie d’un traitement journalistique.
En cette période périlleuse pour la liberté de la presse, le SNJ appelle la profession à la plus grande vigilance. Refusons à des organismes étatiques le soin de décider à la place des médias ce qui doit relever ou pas du traitement de l’information.
Paris, le 12 mai 2017
MacronLeaks_non aux consignes de l’Etat dans le traitement de l’information