Préserver santé et sécurité, et concilier vie professionnelle et vie personnelle, sont des droits élémentaires pour tout citoyen. Mais pas à France Télévisions, où la direction multiplie les violations de l’accord collectif de mai 2013, en particulier les dispositions relatives au temps de travail. Ce mercredi 16 juillet, le SNJ avait donc assigné la direction de France Télévisions en justice. Miracle : à peine connue la date de l’audience, la direction fait volte-face et promet d’appliquer l’accord collectif avant la prochaine audience, début octobre.
En question : le logiciel « Mon Kiosque », qui doit permettre à chacun d’indiquer ses heures de début et de fin de service, ainsi que les dépassements horaires qui donnent droit à repos compensateur ou heures supplémentaires. La direction refusait de mettre en place ces dispositions. Les journalistes ayant opté pour le forfait jour ne pouvaient pas inscrire les heures de début et de fin de service. Depuis le mois d’avril, à de nombreuses reprises, le SNJ avait exigé que ce logiciel soit paramétré conformément à l’accord collectif de mai 2013. La direction faisait la sourde oreille, jusqu’à cette assignation au tribunal.
Nous prenons acte du fait que la direction semble avoir retrouvé la raison. Mais qu’elle ne seméprenne pas. Cette assignation était une première étape. Nous avons recensé de nombreusesdérives, qui seront autant de points que nous ferons trancher par les juges. En voici un résumé :
Journalistes au décompte horaire
Les journalistes qui sont restés au décompte horaire sont traités comme des parias.
· Planification qui interdit à certains la conférence de rédaction du matin. L’accord collectif de France Télévisions précise pourtant que « la conférence de rédaction est le lieu du débat éditorial ». Par ailleurs, la jurisprudence considère que le harcèlement moral est constitué par l’exclusion d’un salarié des réunions de service, que sont les conférences de rédaction.
· Des journalistes habituellement chargés de certaines tâches (présentation, chroniques, magazines) en sont désormais écartés. Une discrimination inadmissible.
· Les équipes de reportage sont parfois programmées de manière à empêcher journalistes au forfait jours et journalistes au décompte horaire de travailler ensemble. Encore une forme de harcèlement, doublée d’une volonté de diviser les rédactions.
· Consignes absurdes passées à des salariés de « respecter impérativement la pause repas de 2h00 », alors qu’ils sont en reportage, sans aucune lisibilité sur les temps de pause.
· Refus quasi-systématiques des repos compensateurs ou des heures supplémentaires, alors que les dépassements horaires sont évidents.
· planifications ubuesques, avec des fins de service à 17h48 par exemple, ou des demi-journées d’actu, de 2 ou 3 heures.
Le SNJ vous recommande de remplir “l’autodéclaratif” hebdomadaire ou le relevé individuel d’activité papier, en indiquant exactement le temps de travail effectué. Une copie de ce document est à conserver, en vue d’une action collective en justice. Si ce document n’existe pas dans votre rédaction, faites cette déclaration hebdomadaire par mail, auprès de votre chef de service.
Journalistes au forfait jours
Rythme de travail infernal et illégal imposé à des équipes de reportage. Nous avons relevé par exemple des journées d’une amplitude de 18 heures, suivie d’une autre journée de travail, sans aucun respect des temps de repos obligatoire. Vos droits sont clairement établis dans l’accord collectif : amplitude journalière de travail limitée à 11h, temps de pause compris, 13h étant le maximum à ne jamais dépasser. Tout dépassement de l’amplitude de 11h peut donner droit à repos compensateur.
Par ailleurs, le temps de travail effectif, hors temps de pause, est limité à 44h en moyenne par semaine, 48h étant la limite maximale possible sur une semaine donnée.
Pour faire respecter vos droits, le SNJ vous recommande la même démarche que pour les journalistes au décompte horaire : remplir scrupuleusement votre relevé individuel d’activité ou rédiger vous-même ce document. Il constitue une preuve, à conserver. La cour de cassation a récemment rappelé que si les temps de repos n’étaient pas respectés, la convention de forfait jours était nulle. Une nullité qui entraîne le paiement des heures supplémentaires, avec une rétroactivité de 3 ans.
Journalistes précaires
Le pire est atteint chez les journalistes CDD et pigistes. La direction leur vole une partie du salaire. Le prétexte est un “bug informatique”, qui bloquerait le paiement des salaires à 35h maximum par semaine. 6 mois après, la preuve est faite. Le prétendu bug informatique est un mensonge éhonté, ou une incompétence grave de la direction. Le SNJ a les preuves que rien n’est réglé.
Pour faire respecter vos droits, le SNJ vous recommande la même démarche que pour les journalistes statutaires : l’autodéclaratif ou le relevé individuel d’activité. Le SNJ reste à votre disposition pour continuer à recevoir copies de ces documents, ainsi que vos témoignages sur les salaires non conformes.
Le SNJ combattra par tous les moyens l’attitude irresponsable de la direction : elle est dangereuse pour la cohésion de l’entreprise, la santé et la sécurité des salariés. C’est la raison pour laquelle nous demandons à la Justice d’intervenir. Nous continuerons les procédures, aussi longtemps que le respect des salariés et de leurs droits ne sera pas redevenu la règle.
Paris, le 18 juillet 2014