C’était un engagement de longue date : la direction devait procéder à l’harmonisation salariale. Faute d’avoir proposé un accord aux organisations syndicales, elle choisit aujourd’hui d’appliquer un système bancal. Il s’agit, au mieux, d’une indemnisation partielle pour une partie des journalistes et PTA qui subissent les discriminations salariales les plus criantes. Nous sommes loin d’une réelle « harmonisation ».
En créant l’entreprise unique en mars 2009, l’Etat s’est placé dans l’obligation de résoudre le problème des disparités de rémunérations entre les salariés des ex-sociétés fusionnées. Cinq ans plus tard, la direction choisit d’appliquer unilatéralement un plan dont les premiers effets seront visibles sur les fiches de paie d’avril.
Concernant les journalistes, un millier de salariés permanents devraient bénéficier d’un rattrapage salarial, parfois modeste. Les sommes vont de 120 euros à plusieurs milliers d’euros par an. Conformément aux termes de l’accord journalistes, signé en septembre 2011 par le SNJ, la CFDT et FO, ce rattrapage sera rétroactif au 1er janvier 2012 (pour les journalistes comme pour les PTA).
Des comparaisons par catégories
La logique du plan « d’harmonisation salariale » de la direction est bâtie sur la détermination de catégories professionnelles homogènes. Pour les journalistes, les comparaisons salariales se font par filière et par année d’ancienneté. Exemple : le salaire médian des journalistes dans la filière reportage avec 17 ans d’ancienneté est de 51.935€ bruts annuels (salaire médian signifie que 50% des journalistes de cette catégorie gagnent plus que cette somme, 50% moins). Ce montant est donc la référence pour cette catégorie. Il existe autant de références différentes que de catégories (journalistes reporters avec 8 ans d’ancienneté, rédacteurs en chef palier 2 avec 24 ans d’ancienneté, etc…).
Tous les journalistes d’une catégorie qui gagnent moins de 95% du salaire de référence bénéficient d’une mesure de rattrapage. Dans l’exemple de la filière reportage avec 17 ans d’ancienneté, cela concerne tous ceux qui gagnent moins de 49.338€ bruts par an.
Harmonisation reporters et encadrants
La proposition initiale du SNJ de procéder à une démarche inter-filières a été retenue. Là encore, c’est la logique de l’accord journalistes de septembre 2011 qui s’applique. Exemple : un grand reporter palier 2 étant dans la grille au même niveau théorique qu’un rédacteur en chef adjoint palier 1, les salaires doivent être comparés. Cet examen inter-filières permet à plus de 200 grands reporters de bénéficier d’une mesure de rattrapage. Pour le SNJ, c’est une reconnaissance pour ceux qui n’ont pas choisi l’encadrement et dont la progression de carrière en était freinée.
Ce plan constitue donc une bonne nouvelle pour les salariés qui vont en bénéficier mais il est très loin de régler le problème des disparités dans leur ensemble. A l’intérieur de chacune des catégories déterminées, des écarts salariaux parfois énormes vont perdurer. Les recours individuels en justice sont donc inévitables.
Par ailleurs, des niveaux de rémunération très élevés existent dans l’encadrement pléthorique de certaines rédactions, notamment au siège. Dans ces catégories, les salaires de référence sont très hauts. L’harmonisation va donc bénéficier à de nombreux rédacteurs en chefs situés en dessous de la barre des 95%, mais qui sont déjà parmi les salaires les plus élevés des stations régionales et ultra-marines. Un effet mécanique mais qui sera perçu comme socialement injuste. Le SNJ défend évidemment l’équité salariale, et ce dans toutes les filières. Mais le problème du ratio d’encadrement et de sa rémunération, en particulier au siège, se retrouve posé.
Aucune garantie pour la suite
Le SNJ regrette également que la direction ait refusé de retenir les mesures proposées par notre syndicat pour prévenir l’apparition de nouvelles disparités. Notamment de fixer les nouveaux minimas salariaux garantis à 95% du salaire médian de chaque catégorie. Ou encore d’éviter que les mesures salariales 2013, 2014 et 2015 bénéficient surtout aux salariés les mieux payés dans chaque catégorie. Plus grave, la question de l’égalité salariale femmes/hommes est toujours en suspens. Nous espérons que la direction ne recreusera pas les disparités qu’elle vient partiellement de combler. Ce serait l’oeuvre de pompiers pyromanes dans une entreprise déjà affaiblie.
Paris le 11 mars 2014