France 3 Limousin « innove » dans la provocation
Le 6 novembre, un rédacteur en chef adjoint a décidé de diffuser dans le JT une interview réalisée avec un smartphone par un journaliste-rédacteur.
Quelques jours auparavant, le rédacteur en chef avait prévenu : pour couvrir le « train du livre », qui amène une foule d’auteurs et de personnalités de Paris à la Foire du livre de Brive, il y aura un journaliste-rédacteur seul. Sa tâche : réaliser photos et vidéos pour le site internet et les réseaux sociaux, voire le JT, fut-il précisé le matin-même.
C’est ainsi que nous avons découvert dans le JT du soir une des interviews réalisées dans ce train avec un smartphone (ainsi qu’une dizaine de photos, réalisées par le même moyen). Précision : ce journaliste n’est pas JRI, et n’a pas la compétence complémentaire.
Avant le journal, des techniciens avaient pris la peine de signaler que l’interview n’était pas diffusable, en raison de sa mauvaise qualité d’image et de son.
Alors quelle mouche a piqué l’encadrant de service ? L’inconscience ? La volonté de « faire le forcing » ? L’envie de tenter une expérience ? Etait-elle cautionnée par le rédacteur en chef ? Une décision d’autant plus absurde qu’il ne s’agissait nullement d’un scoop, loin de là !
Expérience malheureuse en tout cas. Car l’encadrement sait fort bien qu’aucune règle à France Télévisions ne permet ce genre de pratique. Les images réalisées avec des smartphones ne peuvent donc être diffusées que dans des cas exceptionnels (documents amateurs sur des événements rares ou lorsque filmer avec une caméra s’avère impossible). De plus, l’accord compétence complémentaire stipule que, sauf cas exceptionnel, une équipe de reportage se compose de 2 journalistes.
Nous ne pouvons pas sortir cette histoire du contexte national : partout à France Télévisions, la direction fait pression sur les journalistes. Partout, elle les sollicite pour devenir « Mojo » (« mobile journaliste »). Des formations « Mojo » à l’université France Télévisions étant prévues, il faut les remplir !
Quelle est la motivation de cette direction : des économies à tout prix, allant jusqu’à l’inacceptable ? Nous sommes des professionnels de la télévision, pourquoi scier la branche sur laquelle nous sommes assis ? Alors que la qualité technique des téléviseurs sur le marché a considérablement augmenté, on nous demande de faire des images et du son en qualité dégradée : quelle est cette politique suicidaire qui conduit à la destruction de nos métiers de journalistes ou de techniciens de l’image?
La direction joue la provocation, avec un but évident : contourner les accords existants pour passer en force.
Le SNJ exige :
– qu’elle cesse immédiatement ces pratiques qui portent atteinte à notre profession
– qu’elle respecte les textes en vigueur dans l’entreprise
– qu’elle interdise l’utilisation des portables pour les éditions JT classiques, sauf circonstances exceptionnelles.
Limoges, le 19 novembre 2015
France 3 Limousin innove dans la provocation