« Crève sale fils de pute », « on va attendre que tu sortes », « bouffon du dictateur », « virez-le si vous le voyez », « tu dis qu’on est 2000 sinon tu te casses », « il a échappé à une branlée » : ce sont quelques-unes des insultes subies par des équipes de reportage de France Télévisions ou diffusées sur les réseaux sociaux. Dans un cas précis, il y a même la photo d’un confrère JRI, en train de tourner sur un barrage de gilets jaunes, et menacé de représailles.
Sur le terrain, un autre JRI a été entouré et menacé par une soixantaine de personnes. Une équipe a été bloquée dans sa voiture pendant près d’une heure, laissée au bon vouloir des manifestants, qui ont multiplié les insultes. Des véhicules de reportage ont été pris pour cibles et dégradés.
La haine des journalistes est aussi attisée par une prétendue censure à France 3. Il s’agissait en réalité d’une rédaction régionale qui devait rendre l’antenne à la fin d’un JT, et donc interrompre le direct d’une consœur.
Le SNJ apporte tout son soutien aux consœurs et confrères victimes de ces agissements délictueux.
Le SNJ exige de la direction qu’elle fasse preuve de la plus grande fermeté, y compris vis-à-vis des commentaires sur les réseaux sociaux, dont les auteurs doivent être poursuivis. Nos textes conventionnels prévoient une intervention de la direction, y compris devant les tribunaux, pour protéger les salariés : « Tout journaliste a droit, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spécifiques, à une protection contre les menaces, outrages, injures, diffamation, agressions physiques ou verbales et toute atteinte à la personne dont il peut être l’objet dans l’exercice de ses fonctions ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ».
Ne pas appliquer notre accord collectif, ne pas tenter de poursuivre les auteurs de menaces et de violences, serait accorder à ces derniers une forme d’impunité.
Le SNJ s’interroge également sur le traitement journalistique de cette mobilisation. Sans entrer dans le débat lié aux revendications des manifestants, nous constatons que les principes même du traitement de l’information n’ont pas toujours été respectés. La surmédiatisation en amont de cette opération du 17 novembre pose de vraies questions de fond quant à ce que doit être notre regard journalistique sur ce mouvement, comme sur les autres. A croire que ceux qui dirigent nos rédactions choisissent d’une certaine manière la légitimité ou non des conflits.
Les journalistes ne sont pas des cibles. Il est temps que tous les citoyens, y compris les politiques, le comprennent. Il en va de la liberté de la presse, et donc d’une liberté fondamentale de notre démocratie.
Paris, le 20 novembre 2018
2018-11-20 tract Journalistes et gilets jaunes