C’est une carte de vœux que le SNJ a décidé de vous adresser, Madame la présidente. Premier vœu : mettre fin au règne du père fouettard. Entendez par là qu’il est temps d’en finir avec des pratiques qui empoisonnent le dialogue social, mais aussi et surtout le quotidien des salariés. Le management brutal devrait appartenir au passé, Pourtant, au-delà de quelques gestes symboliques de la nouvelle direction, l’autoritarisme, le harcèlement moral, les dérapages des managers sur le lieu de travail ou dans les instances restent les principes du pouvoir exercé dans notre entreprise.
Notre deuxième vœu : l’information. Tous ceux qui participent à la qualité de nos journaux ou de nos magazines sont inquiets.
A commencer par le réseau régional de France 3. Vous avez mis en place, tout en le niant, un calque entre la réforme territoriale, voulue par le gouvernement, et les nouvelles exigences éditoriales imposées dans les régions. Il faut, dites vous, que la réforme territoriale soit visible sur nos antennes. Un nouveau découpage expérimenté malgré les revendications de notre organisation au cours des élections régionales. Depuis, une note circule dans les régions pour que la réforme trouve écho dans les bureaux régionaux d’information et dans les grilles de programme des antennes régionales.
Un non-sens au regard de ce qui était encore, il y a peu, la force de ce réseau : la proximité ! Un exemple, la mutualisation des Soir 3 régionaux, dans le seul but d’économiser des jours de travail et de ne plus remplir notre mission auprès de nos téléspectateurs. Une mutualisation qui cache sans doute une réforme plus profonde qui toucherait l’emploi. En redéfinissant la carte des capitales de l’information régionale, en fermant des BRI, en ne laissant que quelques équipes pour alimenter les 13 journaux qui resteront, à l’instar des 13 entités voulues par l’Etat.
Notre vœu est donc de vous voir stopper cette aberration éditoriale. Le réseau régional de France 3 ne doit pas être détruit, ce serait désastreux pour les spectateurs fidèles à leur journal régional et dangereux pour l’emploi de nos collègues.
Notre troisième vœu : non encore et toujours à la fusion des rédactions nationales ! Votre nouveau directeur de l’information a évoqué sa volonté de borner les effets pervers de la fusion. Pour un philosophe, cela peut s’apparenter à un euphémisme, mais pour nous c’est tout d’abord un premier aveu !
Il y a donc bien des effets pervers dans cette fusion. Notre cohérence, au SNJ, c’est de vous dire et donc de vous redire, que c’est bien l’ensemble de cette fusion qui aura des effets pervers sur les trois rédactions concernées. La fusion ne vise pas à rassembler pour être différents, mais à tout confondre et à faire disparaitre les corps sans laisser de trace ! Disparition du pluralisme, de l’autonomie éditoriale, de la différence de traitement, et de la pensée multiple.
Nous refusons la fusion des rédactions parce que c’est une valorisation de la pensée unique, véritable poison de l’information. Tout comme cette France du micro-trottoir, du populisme médiatique qui inquiète sans analyser et qui disserte sans avoir vérifié.
Arrêtez donc cette fusion, puisque rien n’a commencé. De plus, vous avez un autre projet qui va percuter le funeste Info 2015 : la chaine info en continu, dont nous allons débattre aujourd’hui.
Pour que cette chaine info en continu ait ses chances, il vous faut vous rendre à l’évidence : on ne peut pas mener ces deux projets de front. Vous sans doute, mais pas les salariés concernés. Ni les élus, ni les organisations syndicales déjà majoritairement opposés à la fusion des rédactions. Un calendrier contraint pour la chaine info en continu associé à une fusion qui n’a pas encore de réalité : le choix devrait être simple. En l’espèce, renoncer n’est pas capituler.
La chaine info en continu est donc à l’ordre du jour de ce CCE. Nous n’allons pas anticiper sur ce débat. Mais les quelques éléments déjà connus laissent beaucoup de nos collègues sur leur faim. C’est un projet de patrons de l’audiovisuel public disent-ils, pas un projet pour les salariés de cette entreprise. Pas plus qu’une nouvelle vision de l’information en continu.
De plus nous sentons venir la difficulté de la négociation que vous voulez ouvrir en vue d’un accord spécifique pour cette chaine tout info. Le SNJ rappelle un principe fondamental de notre profession : le journalisme n’est pas une compétence complémentaire, ce qui n’empêche en aucun cas évidemment des reconversions validées. Ce n’est pas un archaïsme de notre part, mais une des clés de la réussite pour la collecte, la vérification et la publication d’une information de qualité. Vous aurez donc compris notre quatrième vœu : que cette chaine d’info en continu, ne soit pas une copie éditoriale et sociale de celles qui existent déjà.
Cinquième vœu : halte au plan « horizon 2015 ». Faire en sorte que les rédactions télé, radio et web outre-mer ainsi qu’à France Ô ne fassent plus qu’une seule et grande rédaction. Une fusion à marche forcée avec, par exemple, des tentatives de suppression de rédacteurs en chef notamment en radio en Guyane. Un plan refusé ici même en séance par la majorité des élus, car non abouti dans sa conception. Un plan, là aussi dont les économies possibles ont été pensées mais pas l’éditorial.
Dire non n’est pas de l’immobilisme, c’est au contraire affirmer notre vision de l’information de service public. Nous ne défendons pas le statu quo, puisque nos propositions existent et sont régulièrement exposées dans les instances entre autres.
Mais au moment où un nouveau directeur de l’information prend ses marques, le SNJ en profite pour rappeler qu’il ne laissera pas la maitrise des coûts prendre encore un peu plus le pas sur l’éditorial. Nous espérons enfin qu’il saura se mettre en conformité avec l’article 6 de la convention collective nationale du travail des journalistes qui précise qu’aucune entreprise « ne pourra employer pendant plus de trois mois des journalistes professionnels et assimilés qui ne seraient pas titulaires de la carte professionnelle de l’année en cours ou pour lesquels cette carte n’aurait pas été demandée. »
Paris, le 15 décembre 2015
Comité central d’entreprise-La carte de voeux du SNJ