Avec une pandémie d’une telle gravité, on est en droit d’exiger de la direction de France Télévisions des mesures de protection exceptionnelles pour tous les salariés. Or, selon les antennes et les sites, on est parfois loin du compte.
Le SNJ met la direction en garde : en refusant d’entendre la parole des salariés et de leurs représentants, la continuité du service public audiovisuel ne pourra pas être assurée très longtemps alors que la crise sanitaire pourrait durer des semaines, voire des mois.
Au troisième jour du confinement national, direction et syndicats représentatifs au niveau de l’entreprise ont échangé ce jeudi en audio conférence durant deux heures sur l’impact à France télévisions de la crise sanitaire.
Premier constat, une majorité de salariés se trouve confinée à domicile. Certains y pratiquent le télétravail, d’autres ne le peuvent pas et sont de fait en absence autorisée. Plusieurs emprises régionales et ultra-marines ont dû fermer leurs portes pour raisons sanitaires, parfois pendant plusieurs jours. Dans les sites restés ouverts, le nombre de salariés présents est très faible : selon la direction, environ 270 personnes étaient hier au Siège contre plus de 3000 un jeudi en temps normal. Même constat dans les antennes régionales et stations ultramarines avec le plus souvent, entre 15 à 30 salariés présents selon les sites. Arrêt total de l’activité pour les équipes régionales de la Fabrique, télétravail pour la majorité du personnel administratif, pour un grand nombre de journalistes mais aussi certains techniciens, flou artistique pour beaucoup d’autres. La direction ne le cache pas, elle entend recourir au chômage partiel (avec maintien intégral du salaire) pour les personnes concernées.
Deuxième constat, nul ne veut opposer notre mission d’information à l’obligation de protéger les salariés, mais concilier ces deux impératifs s’avère difficile. Surtout quand les moyens consacrés à la protection ne semblent pas à la hauteur des ambitions éditoriales. La direction affirme que les mesures de sécurité mises en œuvre sont suffisantes quand elles sont respectées. Les équipes de reportages et les salariés présents dans les établissements sont loin d’en être tous convaincus ! Le SNJ ne prétend pas détenir une vérité scientifique sur ce point mais craint que les certitudes affichées par la direction soient en partie liées à la pénurie de matériels de protection constatée à France TV comme dans tout le pays.
Dans ce contexte, le SNJ estime que les salariés confrontés à d’importantes failles dans le dispositif de prévention de la contamination (comme ce fut le cas mercredi au Siège, et en particulier à la rédaction de France 3 le-de-France) peuvent légitimement faire valoir leur droit de retrait, comme la loi le permet en pareilles circonstances. Même si la direction a choisi comme posture de le contester.
Troisième constat, face à cette menace sur la santé des équipes et compte tenu des attentes de la population, l’offre d’information de France Télévisions devra encore évoluer dans la forme comme dans le fond. La mutualisation des éditions, les JT « grandes régions » et la réduction du nombre de tournages sont déjà des réponses à ces contraintes inédites. L’exceptionnel du moment reste pour le SNJ exceptionnel. Au sortir de cette crise sanitaire nous serons extrêmement vigilants.
Pour remplir nos missions dans la durée (la crise sanitaire pourrait durer des semaines, voire des mois) il faudra sans doute équilibrer différemment l’offre d’information entre chaînes de télé et les plateformes numériques, plus adaptées au télétravail. C’est d’ailleurs la piste qui semble privilégiée par la direction pour les stations d’outre-mer, où l’articulation entre télé, internet et radio serait provisoirement modifiée.
Pour les reportages télé, les plus « lourds », il faudra sans doute mieux planifier les équipes disponibles, organiser des roulements, fonctionner en petits groupes avec véhicule et matériel dédié, favoriser l’autonomie, mais aussi proscrire les interactions risquées sur des tournages qui ne semblent pas toujours incontournables.
Si la sécurité immédiate des salariés est aujourd’hui une préoccupation majeure, il faudra également trouver des réponses pour les nombreux CDD, pigistes et intermittents réguliers, pour qui France Télévisions est un employeur important et qui ont vu des promesses de contrats disparaître.
Menaces sur la santé des salariés, entrave de l’activité, dégradation de l’emploi, les différentes facettes de la crise du COVID-19 nous imposent de sortir sans tarder les instances représentatives du personnel de leur confinement actuel. Ces instances, qui doivent trouver le moyen de fonctionner différemment mais efficacement, ont un rôle essentiel à jouer dans la protection et l’information des salariés de France Télévisions.
Paris, le 20 mars 2020