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AA lettrine articles

France 3 Picardie

Ras-le-bol. Pour les journalistes de terrain, qui traitent quotidiennement l’actualité, la coupe est pleine.

Lundi matin, juste après la conférence de rédaction de France 3 Picardie, une journaliste exprime son désaccord à propos d’un projet de reportage. L’encadrement veut un sujet, 48H00 après la victoire contestée pour tricherie du cycliste picard Arnaud Démare sur la classique Milan-San Remo. L’information avait été traitée sous forme d’un « off » dans l’édition du weekend. Lundi, le coureur ne veut plus parler à la presse. Ce sera donc un sujet sans le principal intéressé.

Faire un sujet à J+2 sans le coureur mis en cause, est-ce bien pertinent ? « Si tu n’es pas capable de faire un sujet d’actu… » lui rétorque le rédacteur en chef. Très classe envers une journaliste qui a tous les contacts nécessaires et 30 ans de métier !

En réalité, c’est le droit de contester les choix de l’encadrement qui pose problème. Réfléchir, c’est déjà désobéir, dans une atmosphère où les journalistes sont vus comme des subordonnés et des exécutants. Devant le refus argumenté, mettant en cause les lacunes de l’encadrement sur le timing du traitement de ce sujet, le rédacteur en chef sort l’arme fatale : « Je peux aussi comme je l’ai déjà fait te mettre uniquement sur l’actu ». Il semble donc envisager de lui retirer sa spécialité de journaliste « santé ». Sympathique référence à une crise précédente, qui avait eu pour conséquence un départ à la retraite anticipé et une rupture conventionnelle de deux journalistes l’an passé. T’es pas content ? Tu te casses !

À une autre journaliste qui se propose de traiter la justice, faute de référent en la matière, il est rétorqué par le rédacteur en chef que ce sera faits-divers ET justice. Et qu’elle devra quitter définitivement la présentation. C’est tout ou rien.

Manier la carotte et le bâton, agiter la menace, fragiliser, déstabiliser. Voilà sans doute une technique de management qui va mettre en confiance l’équipe rédactionnelle et la fédérer autour d’un projet commun ?

Déconsidération et infantilisation des journalistes, JT verrouillés la veille avec, souvent, des sujets pré-calés à partir de communiqués et d’articles parus dans la presse écrite,  interlocuteurs choisis par l’encadrement et rendez-vous pris à des horaires précis : voilà la potion indigeste que l’on veut nous faire boire !

A l’initiative du SNJ, de nombreux journalistes ont demandé une réunion de service pour exposer toutes ces problématiques, et leur souffrance. Réunion refusée par la rédaction en chef.

Le SNJ exige que ces méthodes de management d’un autre âge disparaissent. Il rappelle que dans l’accord d’entreprise de FTV : « la conférence de rédaction est le lieu du débat éditorial » et que « le journaliste ne peut être contraint à accepter un acte contraire à son intime conviction professionnelle ». En l’absence de réponse à cette demande, la direction assumera les conséquences du conflit qu’elle provoquera. Le SNJ, lui, saura prendre ses responsabilités.

 Amiens, le 24 mars 2016

Réfléchir c’est déjà désobéir france3 picardie